Maria Deraismes, une pionnière entre féminisme, lettres et franc-maçonnerie
- lesplumesdupasse
- il y a 13 heures
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Marie Adélaïde Deraismes, dite Maria Deraismes, est une figure aussi brillante qu’audacieuse du XIXe siècle. Femme de lettres, militante féministe, libre penseuse et première femme initiée en franc-maçonnerie mixte en France, elle incarne un combat toujours d’actualité : celui des droits humains, en particulier ceux des femmes et des enfants.

J’ai découvert cette autrice à travers son essai Les Droits de l’enfant, un texte d’une puissance saisissante. Les thématiques qu’elle y développe la protection des enfants, lutte contre les violences, éducation, résonnent encore très fort dans notre époque. Ce fut pour moi une rencontre littéraire marquante.
Maria Deraismes n’a pas suivi de cursus scolaire traditionnel. Elle apprend à lire avec sa sœur aînée et se plonge très jeune dans les écrits des philosophes grecs, des textes sacrés de l’Inde, et des penseurs allemands. À seulement douze ans, elle improvise des discours dans le kiosque du jardin familial, rédige des pamphlets, des pièces de théâtre, et les présente dans les salons bourgeois.
Elle rêve d’abord de devenir peintre, mais se tourne rapidement vers l’écriture. Après la mort de leur mère en 1862, Maria et sa sœur s’installent dans la maison familiale, où elles tiennent un salon fréquenté par les intellectuels de la démocratie libérale.
En 1866, elle est invitée à la loge du Grand Orient de France par Léon Richer, pour répondre à un article misogyne de Barbey d’Aurevilly. Ce fut le point de départ d’un long engagement. Elle multiplie les conférences, écrit pour la presse et cofonde en 1869, avec des figures comme Louise Michel, la Société pour la revendication des droits civils des femmes.
En 1870, elle préside l’Association pour le droit des femmes, puis participe au journal Le Droit des femmes. Pour elle, la lutte féministe est indissociable de la défense de la laïcité et de l’éducation pour tous, en particulier les filles. Elle soutient les initiatives de Louise Michel, notamment en matière d’éducation populaire, et défend ardemment le suffrage universel.
La franc-maçonnerie, longtemps réservée aux hommes, se ferme aux revendications féminines. Malgré les refus répétés des obédiences officielles, la loge du Pecq entre en résistance : en 1882, Maria Deraismes devient la première femme initiée au sein de la loge Les Libres-Penseurs.
Ce geste provoque un tollé. La loge est suspendue. Mais Maria persiste. Entre 1892 et 1893, elle initie à son tour plusieurs femmes républicaines chez elle, leur conférant, avec le docteur Georges Martin, le grade d’apprenti-maçonne.
En 1893, elle fonde la première obédience maçonnique mixte, qui deviendra l’Ordre maçonnique mixte international Le Droit Humain. Un acte fondateur pour l’histoire de la franc-maçonnerie féminine et mixte.
Maria Deraismes meurt en 1894, sans avoir vu son œuvre pleinement accomplie. Elle laisse derrière elle cette phrase bouleversante :
Je vous laisse le Temple inachevé, poursuivez, entre ses Colonnes, le Droit de l’Humanité.
Son héritage dépasse les frontières de son époque. Elle a œuvré pour une société plus juste, plus égalitaire, plus éclairée. Aujourd’hui encore, son message résonne : dans les luttes féministes, dans les combats pour la laïcité, et dans l’idée que la pensée libre et la culture peuvent être des armes puissantes.
Pourquoi je vous parle d’elle
Parce que Maria Deraismes n’était pas seulement une militante ; elle était aussi une femme de lettres, une oratrice brillante, une penseuse. Ses textes touchent par leur humanisme et leur modernité. En partageant son portrait, je souhaite lui redonner une place dans notre mémoire collective, là où elle mérite d’être : au cœur des luttes pour les droits humains et de la littérature engagée.
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